« Les femmes jouent un rôle important dans l’essor de l’agriculture bio et la recherche de nouvelles façons de travailler »

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En 2025, un agriculteur sur quatre est une agricultrice. Cette réalité semble encore largement ignorée par l’opinion publique, les médias, mais aussi une bonne part de la profession agricole. D’où vient ce curieux aveuglement contre lequel nombre d’agricultrices ont lutté et luttent encore ? Au milieu des années 1950, la France comptait près de 2 millions d’agricultrices. Leur nombre tombe à 1 million à la fin des années 1960. Elles n’étaient plus que 103 000 en 2022, d’après la Mutualité sociale agricole, sur environ 400 000 chefs d’exploitation, selon l’Inrae (2020). Un recul considérable qui renvoie à la très forte diminution du nombre d’actifs dans l’agriculture au XXe siècle.

Toutefois, encore plus que leurs homologues masculins, les jeunes femmes fuient les campagnes. Leur nombre est divisé par 20 en soixante-dix ans. Ainsi, on comprend mieux le bal des célibataires dans le Béarn, évoqué par le sociologue Pierre Bourdieu (1930-2002), ou le témoignage d’une jeune paysanne de l’Isère cité en 1963 par le syndicaliste agricole et homme politique français Michel Debatisse (1929-1997) : « J’ai vingt ans et je n’ai pas d’amie (…). Je ne sors jamais (…). Les dimanches sont pareils aux autres jours. » Une solitude souvent pesante, mais aussi un travail harassant.

Premières levées, dernières couchées, leur travail sur l’exploitation n’est pas reconnu, leurs journées sont consacrées aux travaux agricoles mais aussi aux tâches domestiques et familiales, qui sont étroitement intriquées, d’où un travail émietté et ininterrompu. En outre, elles sont longtemps demeurées dépendantes de leur conjoint sur le plan économique et social. Cette absence de statut explique que beaucoup d’agricultrices retraitées vivent aujourd’hui avec des pensions réduites.

Vers un statut reconnu

Néanmoins, à partir des années 1960-1970, une minorité de jeunes femmes des campagnes veulent devenir agricultrices, mais « pas comme leur mère ». Elles ne veulent plus être esclaves, demandent à être reconnues, entendent avoir leur mot à dire sur l’exploitation et commencent souvent une activité distincte de celle de leur conjoint. D’autres choisissent de travailler à l’extérieur, même si elles donnent fréquemment « un coup de main » ou soutiennent financièrement l’exploitation.

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