Au procès de la rue d’Aubagne, les témoignages poignants des proches de victimes

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Des participants à une marche en mémoire des victimes accrochent une banderole « Six ans déjà, ni oubli, ni pardon » rue d’Aubagne, à Marseille, le 5 novembre 2024.

Un jeune homme la tête coiffée d’un chapeau de feutre, un autre tout sourire le visage encadré de dreadlocks, une jeune femme qui pose en robe d’été sur un fond de tournesols, une autre les bras ouverts devant l’océan… Sur les dix écrans géants de la salle d’audience du tribunal correctionnel de Marseille réservée aux procès hors normes, les photos des victimes des effondrements des immeubles de la rue d’Aubagne accompagnent, depuis vendredi 15 novembre, la déposition de leurs proches. Le tribunal a réservé six jours pour évoquer les parcours de vie des huit victimes et entendre un grand nombre des quelque 90 parties civiles.

« Celle-là, elle est bien », dit Léo Lavieille lorsque le président du tribunal Pascal Gand fait défiler les photos de son père Fabien Lavieille, enseveli à 54 ans sous les décombres du 65 rue d’Aubagne. T-shirt du groupe Massilia Sound System dont il était un inconditionnel, blouson et poing levé… l’image résume son père « un écorché vif, trop gentil et grand rêveur ».

« J’étais pas fan que mon père habite ici, ça sentait la pisse dans le hall mais il était toujours en mode c’est pas grave. » Léo Lavieille passe en revue les galères d’une existence difficile marquée par le décès de sa mère, la maladie de son père dont les poumons avaient été endommagés par l’amiante du temps où il travaillait dans le bâtiment. Mais il prend à témoin la photo affichée : « Il avait toujours le sourire, malgré tout ce qu’il a vécu. »

Sourire, « Sorriso » en italien, c’était le surnom de Simona Carpignano, 30 ans, dont les parents venus de Tarente, Domenico et Maria, évoquent une jeune femme militante humaniste, chez elle dans les Pouilles où elle enseignait l’italien aux migrants rescapés d’une traversée périlleuse et à Marseille où sa connaissance de l’arabe appris à la Sorbonne lui permettait de faire des traductions pour ceux qui en avaient besoin. « Elle a été trahie dans tout ce qu’elle aimait, le respect de la dignité de l’humain. Tout ce en quoi elle avait cru s’est retourné contre elle », déplore sa mère qui enseigne les notions de sécurité pour le ministère de la défense italien.

« Pourquoi la protection civile a dit de ne pas s’inquiéter ? », déplore-t-elle alors que le président du tribunal lit les messages inquiets de Simona à sa propriétaire. « J’ai peur que bâtiment est en train de s’incliner », alerte la jeune femme le 16 octobre 2018. Informés de l’état de l’immeuble, ses parents lui avaient adressé un virement pour qu’elle s’en aille au plus vite, qu’elle se réinstalle immédiatement ailleurs. « Si nous avions su qu’il y avait eu une évacuation de l’immeuble [le 18 octobre durant quelques heures], nous serions venus la tirer par les cheveux pour qu’elle sorte. »

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