L’Afrique de l’Ouest, au cœur des réseaux de financement du Hezbollah

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La mosquée Al-Mahdi, point de ralliement de la communauté chiite libanaise, dans le quartier de Marcory, à Abidjan (Côte d’Ivoire), en juin 2021.

A Abidjan, le quartier de Marcory a entamé un deuil discret après la mort du leader du Hezbollah, Hassan Nasrallah, tué dans une frappe israélienne vendredi 27 septembre. Dans ce fief de la diaspora libanaise en Côte d’Ivoire, à 5 000 kilomètres de Beyrouth, quelques commerces sont restés fermés, ainsi que la grande mosquée chiite Al-Mahdi.

« Nous sommes forcément tristes en observant ce qui se passe au Liban », confie pudiquement Elie, un entrepreneur ivoiro-libanais. Tout comme avec les près de 100 000 Libanais vivant dans le pays – dont 80 % sont musulmans chiites –, évoquer le Hezbollah crispe et conduit au mutisme.

Dans ce quartier surnommé le « petit Beyrouth », personne ne se risque à parler du « Parti de Dieu » et de son influence. Pourtant, son ombre plane. La plupart des chiites libanais en Côte d’Ivoire, et plus largement en Afrique de l’Ouest, contribuent indirectement à l’effort de guerre du Hezbollah au Proche-Orient à travers la « zakat », une taxe informelle.

En parallèle de ces contributions volontaires, un entrepreneur d’origine chrétienne maronite installé au Cameroun expliquait il y a quelques années l’existence d’un racket institutionnalisé sur l’ensemble de la diaspora libanaise. « Si tu ne payes pas, tu es exclu de toutes les cérémonies » relatait-il sous couvert d’anonymat.

Aucun montant n’est connu tant le réseau est vaste et opaque. Devenu un Etat dans l’Etat au Liban, l’organisation a bâti une économie parallèle qui s’appuie sur un vaste réseau de blanchiment d’argent lié au trafic de drogue, de diamants, de bois et d’armes en Amérique du Sud et en Afrique de l’Ouest, bénéficiant au passage de la complicité de sa diaspora.

Contrebande et narcotrafic

Historiquement soutenu et financé par l’Iran, le Hezbollah tire 30 % de ses revenus d’activités mafieuses, selon les chiffres de la Fondation pour la défense des démocraties (FDD), un think tank néoconservateur américain. « La contrebande et le blanchiment d’argent sont difficiles à estimer mais dépassent probablement les 300 millions de dollars par an », précise Emanuele Ottolenghi, expert du Hezbollah au sein du FDD.

L’Amérique du Sud est une source de revenus à travers le narcotrafic quand « l’Afrique de l’Ouest joue le rôle de point de transit où la large communauté libanaise, bien implantée dans le milieu des affaires et influente dans les cercles politiques, aide à la logistique du blanchiment d’argent puis des transferts de fonds vers le Liban », note l’expert. Les réseaux du Hezbollah sont proches des cartels colombiens et mexicains, dont ils « lavent » une partie des revenus en Afrique.

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