Comment l’armée de terre accélère sa bascule vers l’est de l’Europe

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Pierre Schill, chef d’état-major de l’armée de terre française, à Gdańsk en Pologne, le 5 mars 2024.

Dans les sous-sols du quartier Kléber, ce vaste ensemble militaire en brique rouge situé au cœur de Lille, un nouveau centre de commandement a vu le jour. Il y a un an, ce n’était encore qu’une cave inutilisée. Mais aujourd’hui, cette salle étroite que Le Monde a pu visiter, à laquelle on accède par un petit escalier, se veut le nouveau centre de pilotage des opérations de l’armée de terre en Europe. Le quartier général de ce qui a été appelé le « commandement terre pour les opérations aéroterrestres en Europe » (Commandement Terre Europe, CTE), qui doit faire l’objet d’une visite officielle du général Pierre Schill, chef d’état-major de l’armée de terre, vendredi 4 octobre, et auquel une soixantaine de militaires ont été affectés.

Lancé en octobre 2023, afin d’amorcer la bascule de l’armée de terre de l’Afrique vers l’Europe dans un contexte d’éviction progressive du Sahel et de retrait des forces françaises du Niger, le CTE ne réunissait, au départ, qu’une poignée d’officiers serrés dans quelques bureaux de la caserne Kléber. Mais, face à la montée de la conflictualité en Europe dans le sillage de la guerre en Ukraine, l’état-major des armées a accéléré sa réorganisation. Un défi autant humain – l’effort s’étant fait à effectifs constants pour l’armée de terre – que culturel, après trente ans de contre-terrorisme sur le continent africain.

Les sous-sols du CTE sont donc désormais aménagés selon les normes d’un centre de conduite des opérations de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN). Une grande table en « U » et une dizaine de fauteuils ont été installés à côté d’une série de postes de crise étagés sur trois niveaux, face à un gigantesque écran qui permet de visionner en temps réel plusieurs opérations menées simultanément. La salle a été équipée d’un système de visioconférence flambant neuf. Tout autour s’affiche l’heure des pays européens clés pour les opérations françaises en Europe : Pologne, Roumanie, Arménie, Estonie, Ukraine ou encore Bosnie. Sur un mur, une carte en relief de la Roumanie et de la Moldavie apparaît presque anachronique dans ce poste de commandement high-tech.

Pas de « Schengen militaire »

Le général Pierre-Eric Guillot est le chef de ce PC Terre Europe, dont le symbole récemment choisi pour l’incarner est un lion des Flandres sur un écusson à fond bleu. C’est lui qui est chargé de planifier et de préparer l’engagement des forces terrestres sur tout le territoire européen. A ce poste, il pilote notamment les trois principales opérations françaises en Europe : « Lynx » en Estonie, où environ 540 militaires sont déployés, « Aigle » en Roumanie (entre 800 et 1 000 soldats projetés) et toutes les formations dispensées aux soldats ukrainiens en Pologne, sous l’égide de l’Union européenne.

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