Hera part mesurer l’impact de la mission-suicide DART sur l’astéroïde Dimorphos

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Vue d’artiste des deux CubeStats de la mission Hera autour de la paire d’astéroïdes Dimorphos-Didymos.

Pour les scientifiques et ingénieurs qui se consacrent à une mission d’exploration spatiale, l’investissement se compte en années et rien n’est plus douloureux que de voir le vaisseau mourir avant d’être entré en action. Cela a, par exemple, été le cas pour la mission Cluster de l’Agence spatiale européenne (ESA), perdue dans l’explosion d’Ariane-5 lors de son vol inaugural en 1996, pour le Mars Climate Orbiter de la NASA, détruit en arrivant sur Mars en 1999 à cause d’une confusion déplorable entre système métrique et unités anglo-saxonnes, ou, plus récemment, pour l’atterrisseur lunaire indien Chandrayaan-2, qui s’est écrasé sur notre satellite en 2019.

Mais il est des morts moins spectaculaires, des missions à qui les agences spatiales tordent le cou avant même que les sondes soient construites, dans le feutré des arbitrages budgétaires. C’est ainsi qu’est mort, en 2016, l’Asteroid Impact Mission (AIM) de l’ESA, qui devait observer l’impact du vaisseau kamikaze américain DART (pour « test de déviation d’un astéroïde double ») sur Dimorphos, petit astéroïde formant un système double avec son grand frère Didymos. Ce, afin d’établir s’il était possible de dévier un éventuel « astéroïde-tueur » menaçant de ravager la Terre.

Très impliqué au sujet de l’AIM, Patrick Michel, directeur de recherche au CNRS à l’Observatoire de la Côte d’Azur, se souvient de cette annulation comme « le pire moment de [sa] carrière ». « J’ai beaucoup pleuré, reconnaît-il. C’était horrible. » Patrick Michel se console aujourd’hui, car l’ESA a « remonté » une autre mission du même genre, Hera, avec un budget de 390 millions d’euros, qui doit décoller, lundi 7 octobre, de Cap Canaveral (Floride), à bord d’une fusée Falcon-9 de SpaceX.

« Un monde différent »

Bien sûr, le vaisseau DART n’a pas attendu. Lancé à 22 000 km/h, il s’est écrasé sur Dimorphos en septembre 2022, alors que la sonde européenne n’arrivera qu’en octobre 2026 pour constater les dégâts. Cependant, assure Patrick Michel, également responsable scientifique d’Hera, « quatre ans après l’impact, ses conséquences n’auront pas changé ». La sonde américaine a envoyé des photos de la zone qu’elle allait percuter. Les chercheurs pourront donc jouer à la comparaison avant-après. « Il est difficile de faire une prédiction, explique l’astrophysicien. On peut avoir laissé un cratère comme on peut avoir complètement déformé l’astéroïde. On va donc voir un monde tout à fait différent des images de DART. » Même Didymos pourrait avoir changé d’aspect si les rochers expulsés de la surface de son voisin l’ont bombardé.

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