A Gaza, le naufrage du ponton humanitaire américain

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Acheminement des camions d’aide humanitaire du quai flottant construit par les États-Unis, avant d’atteindre la plage sur la côte de la bande de Gaza, le 25 juin 2024.

S’il fallait résumer le naufrage de la politique américaine à Gaza, le ponton aménagé sur la côte de l’enclave palestinienne en mai, afin d’y livrer de l’aide humanitaire, serait un cas d’école. A la fin juin, l’ouvrage a été remorqué pour la troisième fois à l’abri, dans le port israélien d’Ashdod. Le mauvais temps le rendait par trop instable. Le vent ne souffle pourtant pas bien fort dans la région.

Plusieurs responsables américains ont indiqué à l’agence Associated press qu’il pourrait ne pas être réinstallé au large de Gaza. Les Etats-Unis abandonneraient là ce projet qui a coûté 212 millions d’euros, pour un résultat dérisoire. Il n’a permis de distribuer que 4 000 tonnes de nourriture environ dans l’enclave où près de deux millions de personnes souffrent de la faim. C’est à peine l’équivalent de 200 camions, la moitié de ce qui entrait à Gaza chaque jour avant la guerre.

« Ce projet était grotesque dès le premier jour, une simple diversion. Les Américains auraient mieux fait de convaincre Israël de laisser passer les camions par la route, depuis leur port d’Ashdod. En deux mois, le projet a sombré dans le ridicule », résume un haut administrateur des Nations unies. Le président américain, Joe Biden, avait lui-même annoncé cette tentative le 7 mars, peu après le massacre dit « de la farine ». Un rare convoi de nourriture escorté par l’armée dans la métropole de Gaza avait été pris d’assaut par une foule affamée. Des soldats avaient ouvert le feu. Près de cent-vingt morts avaient été récensés par les autorités de santé local.

Un aveu d’impuissance

Les quantités que l’armée américaine se dit alors capable d’acheminer apparaissent déjà très limitées. Son autonomie est aussi relative puisqu’elle dépend des Israéliens pour sécuriser ses bateaux et la côte, où « pas une botte américaine » ne doit se poser. En réalité, ce projet est déjà un aveu d’impuissance.

Les Etats-Unis ont cessé à l’époque de promouvoir une sortie diplomatique par le haut : ils n’évoquent presque plus la possibilité de relancer la solution à deux Etats après-guerre. Ils n’ont pour horizon que l’hypothétique libération d’otages à la faveur d’un cessez-le-feu négocié avec le Hamas. Face à la famine qui guette, ils échouent à convaincre leur allié israélien de rouvrir les frontières terrestres de l’enclave.

A la mi-avril, le Programme alimentaire mondial (PAM) est recruté pour distribuer cette aide. Dans la galaxie des Nations unies, l’agnce est historiquement la plus proche de l’administration américaine. Elle est dirigée par Cindy McCain, veuve de l’ancien sénateur et candidat à la présidentielle de 2008 pour le parti républicain John McCain. Un mois plus tard, le 18 mai, le PAM récupère sur la côte un premier chargement, qui n’atteindra jamais ses entrepôts de Deir Al-Balah : il est pillé en route par la population.

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