Le « zéro artificialisation » des sols, un impératif et un défi pour reprendre la main sur l’urbanisation

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Laurent Wauquiez marchait sur du velours, fin septembre, en annonçant crânement à quelque 400 maires ruraux réunis en congrès à l’Alpe-d’Huez (Isère) avoir décidé que la région Auvergne-Rhône-Alpes, qu’il préside, « sortait du dispositif ZAN ». La mise en œuvre du zéro artificialisation nette (ZAN) d’ici à 2050 qu’impose la loi Climat et résilience de 2021 est « ruralicide », martelait le candidat putatif à la présidentielle 2027. Cela revient, disait-il, à « mettre les élus sous cloche ». « Ce que l’on demande, c’est (…) une ruralité vivante où ce sont les élus qui décident de la politique d’aménagement de leur territoire ». Applaudissements dans la salle, acclamation du président des maires ruraux.

La loi « s’applique à tous (…). Lutter contre l’artificialisation des terres n’est pas une option, c’est un impératif », a aussitôt réagi le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, Christophe Béchu. D’ici à fin 2030, la France doit bétonner moitié moins qu’entre 2010 et 2019, une première étape avant le zéro net exigé d’ici à 2050. Tout ce qui sera pris à la nature devra alors être rendu. Mais cette démarche de sobriété foncière crispe, y compris parfois chez ceux qui sont conscients de ses motivations : l’effondrement de la biodiversité, la nécessité de préserver des espaces naturels (nourriciers et puits de carbone), les 20 000 à 30 000 hectares qui disparaissent chaque année, soit l’équivalent du Luxembourg en l’espace de dix ans.

La profonde rupture avec le modèle d’aménagement des dernières décennies – le tandem « lotissement et entrées de ville à perte de vue » – et le « zéro » affiché explique une partie des craintes. La crise du logement et les maladresses de la première version de la loi de 2021 n’ont rien arrangé. A l’initiative du Sénat, neuf nouveaux articles ont été votés en juillet : les élus ont gagné quelques mois pour mettre à jour leurs documents de planification, et chaque commune dispose au minimum d’un hectare à urbaniser (non obligatoire). La publication imminente de trois décrets, dont celui qui définit l’artificialisation, doit aider à y voir plus clair.

Les commentaires ne manqueront pas, le texte amendé sera encore jugé imparfait. Face aux prescriptions de la nouvelle loi, les maires, réunis du 20 au 23 novembre en congrès à Paris, ont le choix : soit ils rejouent le traditionnel clivage ville-campagne, nient les interdépendances territoriales et pestent contre des technocrates qui ne comprendraient rien à l’hyperruralité. Soit ils considèrent l’exigence de sobriété comme l’occasion de reprendre la main sur l’aménagement de leur territoire – en écho aux propos de M. Wauquiez – et de ne plus subir l’économie de l’étalement qui a dessiné le paysage ces quarante dernières années, et dont chacun s’accorde au moins à dire qu’elle a vécu.

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